Le futur des applications de rencontres : L’ère du numérique est-elle celle du non-amour ?
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Dans le cadre de notre service de veille, Unitec vous propose régulièrement des ensembles d’articles thématiques pour décrypter les grands sujets de l’innovation. Cet article, rédigé par Alexandre BERTIN responsable de la veille à Unitec et Amélie PIETTE, étudiante Master M2 CPNM, ISIC Bordeaux Montaigne, est le premier d’une série de veille dédiée au futur des applications de rencontres

  1. L’ère du numérique est-elle celle du non-amour ?
  2. La tech au service d’une nouvelle alchimie

L’ère du numérique est-elle celle du non-amour ? [1/2]

Les rendez-vous galants n’existent plus. Aujourd’hui on date. On swipe, on like, on match… Et demain on fera comment pour trouver l’amour ? Tour d’horizon, en deux articles, de nos usages et des innovations en la matière.

L’amour, un marché pas comme les autres ?

Au premier trimestre 2019, l’application de rencontre Tinder devenait l’app la plus rentable avec un chiffre d’affaires de 260 millions d’euros  détrônant Netflix, en tête depuis trois ans, selon une étude menée par Sensor Tower. Notre vie amoureuse devient tellement connectée qu’aujourd’hui on passe massivement par des intermédiaires commerciaux pour se rencontrer. Ce qui fait qu’aujourd’hui, le marché de la rencontre sur mobile est estimée à 2,2 milliards de dollars.

Dans les années 80, en France, seule 1 personne sur 50  avait recours aux petites annonces ou aux agences matrimoniales.

 

Via www.bulletindespalion.fr

 

Désormais 1 personne sur 4 a déjà utilisé un site ou une app. Une étude de eHarmony prédit même que dans 20 ans plus de 70 % des couples se seront rencontrés en ligne. La marchandisation du sexe et de l’amour n’est plus un mythe. Ils seraient même devenus des biens de consommation courante selon Pascal Neveu, directeur de l’Institut Français de la Psychanalyse Active (IFPA) pour le site atlantico.fr.

 

 

« Tinder est une forme sociale qui s’inscrit dans l’histoire de la libération sexuelle en levant les barrières sociales et morales sur la sexualité. Nous pouvons désormais avoir des relations sexuelles avec tout le monde. Or, la mécanique du désir s’accommode mieux de la rareté. De plus, nous sommes devenus des machines évaluatives : on approche les autres moins sur le mode épiphanique de l’amour et davantage comme l’effet d’une évaluation et d’un choix sur le mode de la consommation. On recherche sur les sites de rencontres une adéquation des goûts qui, loin de faciliter les relations, les empoisonnent. Plus on rencontre des personnes, plus on prend conscience de ce qui leur manque. Tout ce processus s’inscrit dans une nouvelle phase de l’individualisme où le moi s’affirme précisément par ce qu’il rejette. »

Eva Illouz, Sociologue, autrice de La fin de l’amour.

 

On observe un décalage de plus en plus grand entre notre représentation romantique de l’amour et nos pratiques amoureuses. L’usage des technologies numériques et des réseaux sociaux dans notre recherche de l’amour a créé une rupture des liens intimes. On entre dans une logique de consommation et d’évaluation de la rencontre. Cet univers de l’e-amour regorge de notes, de commentaires et d’évaluation.

Une tendance que confirme l’agence marketing BETC dans son étude « Love in the Digital Age ». Selon l’agence, les app nous rendent plus sélectifs à l’égard de nos prétendants. En effet, plus on rencontre de personnes différentes, plus on prend conscience de ce qui leur manque. Dans le but de trouver la perle rare qui partage nos valeurs, nos centres d’intérêts et nos attentes, l’on se perd dans une jungle de milliers d’applications qui rivalisent d’inventivité pour répondre aux goûts de tous. Car on le sait, c’est dans la rareté que naît le désir.

Tous victimes du syndrôme Tinderella ?

 

Le syndrome de Tinderella est issu de l’union des termes Tinder et Cinderella. Il caractérise les personnes qui se limitent à profiter de la phase de flirt que leur permet de vivre ce type d’applications, mais sans jamais parvenir (ou vouloir parvenir) à concrétiser un rendez-vous. L’étude BETC montre même que 36% des utilisateurs d’applications de rencontre sont plus intéressés par le fait de recevoir des « matchs » que de faire des rencontres.

 


image from betc.com

Mécontents mais accros

 

Certes, on utilise de plus en plus ces services, mais 83 % des utilisateurs en sont de moins en moins satisfaits. En cause, des échanges de piètre qualité, peu de rencontres intéressantes et une perte de temps. Alors on se déconnecte ? Impossible ! Un français sur cinq se déclare accro à son application préférée.


«Nous avons résolu le problème du volume, comment maintenant résoudre celui la qualité ? Peut-on prédire l’alchimie entre deux personnes ? C’est dur, mais je pense qu’on peut y arriver »

déclarait le CEO de la maison-mère Match (regroupant Tinder, OkCupid, Hinge) en 2019.

Dans un secteur aussi lucratif, on ne doute pas que les acteurs du marché savent être créatifs.

Ô algorithme, dis-moi qui est la plus belle

 

La co-fondatrice de Coffee Meets Bagel, Dawoon Kang, mise sur le machine-learning et les intelligences artificielles. Pour elle, les algorithmes sont capables de proposer des profils plus pertinents, en les laissant scanner notre vie numérique, et ce sans porter de jugement.

 


via GIPHY

 

Difficile d’accepter sans se poser la question de la protection des données personnelles. C’est d’ailleurs pour cela que la sortie, le 13 février dernier, de la nouvelle dating app, conçue par Facebook, a été repoussée en Europe. Ce qui ne l’a pas empêché de profiter du confinement mondial dû au Covid-19, pour proposer Tuned, une application destinée aux couples séparées par les restrictions de distanciation sociale.

Du côté de Tinder, suite aux révélations, de Judith Duportail en 2019, la société aurait retiré de son application  un algorithme nommé Elo Score qui attribuait une note de désirabilité à chaque utilisateur. Elle s’est en effet fendue d’un post sur son blog, en mars 2019, pour expliquer en quoi consistait son algorithme de recommandation et mettre fin aux spéculations d’utilisation du fameux score d’Elo (du nom du mathématicien américain d’origine hongroise Arpad Elo qui créa un modèle algorithmique permettant la mise en place d’un système d’évaluation du niveau de capacités relatif d’un joueur d’échecs ou d’autres jeux à deux joueurs).

 

 

Du côté britannique, Loveflutter, a pris de l’avance en la matière. L’application décortique les traits de caractère de ces utilisateurs en se basant sur leurs tweets. Sans oublier Badoo et son option Lookalikes qui grâce à la reconnaissance faciale sélectionne pour nous le prétendant qui ressemble le plus à notre star préférée. Flippant non ?

 

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LA TECH AU SERVICE D’UNE NOUVELLE ALCHIMIE

 


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